LYON (Reuters) - Lyon s'efforce depuis deux ans de sédentariser dans la petite ville de Tinca, en Roumanie, des familles de Roms installées dans des campements dans l'agglomération lyonnaise pour tenter d'enrayer leur arrivée massive sur son territoire.
Cette opération de coopération décentralisée, unique en France, vise à offrir des conditions de vie décentes à une centaine de familles issues de Tinca, 7.000 habitants dont un tiers de Roms vivant dans des conditions de précarité extrêmes.
"Nous sommes allés voir les Roms installés à Lyon pour savoir d'où ils venaient et il est apparu que la plupart étaient originaires de Tinca", dans l'est du pays, explique Hubert Julien-Laferrière, vice-président du Grand Lyon chargé de la coopération et de la solidarité internationales.
"Sur place, à Tinca, nous avons constaté qu'ils s'éclairaient à la bougie, provoquant des incendies, qu'ils n'avaient ni chauffage, ni toilettes, ni salles de bain."
Pour l'élu socialiste, "la clé du problème passe par leur intégration dans la société".
Le Grand Lyon a donc décidé d'investir 300.000 euros sur trois ans dans cette opération de coopération. La Fondation Abbé Pierre et l'ONG lyonnaise "Villes en transition", qui travaillent sur place en partenariat avec la mairie de Tinca et l'ambassade de France à Bucarest, contribuent chacune à hauteur de 90.000 euros à ce programme.
Les premiers travaux réalisés à Tinca -le raccordement d'une soixantaine de maisons occupées par des familles Roms au réseau d'électricité ainsi que l'ouverture d'un centre multifonctionnel rassemblant bains publics, suivi social et scolarisation des enfants- ont été inaugurés fin 2012.
BAISSE DES RECETTES DE LA MANCHE
En octobre prochain, c'est une centaine de maisons, donc de familles, qui bénéficieront des mêmes infrastructures.
"A Tinca, comme dans de nombreux squats à Lyon, j'ai discuté avec les Roms qui m'ont affirmé que s'ils avaient les moyens de vivre plus décemment chez eux en Roumanie, ils auraient beaucoup moins de raisons de venir séjourner régulièrement en région lyonnaise", explique Hubert Julien-Laferrière.
Olivier Brachet, vice-président du Grand Lyon chargé du logement et de l'Habitat, estime que les calculs seront vite faits, "d'autant qu'ils constatent que faire la manche en France leur rapporte dix fois moins qu'il y a quelques années."
"Nous donnons à ces familles la possibilité de choisir entre vivre le long du périphérique à Lyon ou habiter dans une maison raccordée aux réseaux chez eux. On pense qu'à moyen terme, le calcul économique pour eux sera favorable au retour."
Cette initiative n'a toutefois pas encore inversé les flux migratoires dans l'agglomération, qui compte quelque 2.000 Roms.
"Nous avons déjà intégré 400 Roms à Lyon, c'est bien, mais nous ne pourrons pas aller plus loin", dit Olivier Brachet. "Ils doivent comprendre que le système européen n'est pas un shopping social et qu'ils ne peuvent prétendre au RSA en France."
Il évoque également la réglementation européenne en justifiant l'interdiction d'occuper des squats et des campements ainsi que les expulsions organisées dans le Grand Lyon.
Pour les élus lyonnais, cette opération de coopération décentralisée doit inspirer d'autres communes en France.
"Je dis aux maires français que les maires roumains sont partants pour intégrer leurs Roms au nom de la paix sociale", souligne Hubert Julien-Laferrière.
Pour Olivier Brachet, "ce n'est pas au niveau de l'Europe ou du gouvernement que ça doit se jouer, mais bien au niveau local".
Source : nouvelobs