Le transfert pourrait passer en douce ou en force, c’est selon, avec le projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel qui sera examiné en octobre. Déjà, les critiques fusent sur le fond et la forme.
Alors que le transfert des pouvoirs de la Hadopi vers le CSA n’était pas attendu avant 2014, Les Échos dévoile une stratégie plus que crédible. Le gouvernement pourrait faire passer cette transformation sans qu’elle soit votée en l’intégrant dans le projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel qui doit être examinée au mois d’octobre.
L’idée est de donner au CSA la responsabilité de la riposte graduée. Le conseil supérieur devra endosser le rôle du « méchant » non seulement en envoyant des avertissements, mais en verbalisant les internautes en infraction. Pierre Lescure, auteur du rapport éponyme, envisageait une amende de 60 euros qui pourrait atteindre 1500 euros en cas de récidive. De son côté, la Hadopi conservera des missions sensibles comme la lutte contre le streaming et le direct download. Sur ces deux dossiers, Mireille Imbert-Quaretta, présidente de la CPD, doit proposer pour janvier 2014, des mesures destinées à bâtir un cadre législatif.
Comme l’explique Marc Rees, spécialiste du dossier, « le projet de loi sur l'indépendance de l’audiovisuel a déjà été voté à l’Assemblée nationale sous une procédure dite d’urgence. Selon l’agenda, le projet sera maintenant examiné en octobre prochain au Sénat. Après examen, toujours au pas de course, la procédure s’achèvera par un passage final en Commission mixte paritaire. »
Tout se touche à la Hadopi, au sens le plus large possible, fait l’objet de débats interminables. Et, visiblement, ni le ministère de la Culture, ni le CSA ne veulent entrer dans ce tunnel sans fin. C’est ce qu’a affirmé aux Échos Olivier Schrameck, président du CSA, qui redoute la lenteur de l’appareil légal. Il estime que plus le temps passe, plus le risque est grand de voir réduit à néant le travail effectué par les équipes de la rue de Texel.
Un rejet possible du Conseil Constitutionnel ?
Cette manœuvre est qualifiée de risquée par nombre d’observateurs qui redoutent de fortes polémiques dans à l’Assemblée Nationale, aussi bien chez les socialistes que dans les autres partis politiques pour des raisons très différentes. Beaucoup d’élus de gauche s’attendaient à une disparition pure et simple de la Hadopi comme l’avait envisagé le programme du candidat socialiste. Récemment, la députée frontiste Marion Maréchal-Le Pen est entrée dans le débat en présentant la licence globale comme « plus favorable à le création ».
Pierre Lescure a toujours été farouchement opposé à cette voie, et l’a même qualifié de « truc à deux balles ». Reste qu’en juillet, Eric Walter, secrétaire générale de la Hadopi, a ouvert une réflexion sur le dossier pour légaliser les échanges « non marchands ». En passant par un amendement, ces débats risquent de passer à la trappe.
Interrogé par PC Inpact, Patrick Bloche, député de Paris et président de la Commission des affaires culturelles, dénonce cette tentation de passage qualifié de « en douce » par les uns et « en force » par les autres. « C’est un projet de loi qui vise à rétablir l’indépendance de l’audiovisuel public. Je suis attaché à ce que l’on reste sur ce sujet, ne serait-ce que pour prendre le maximum de protection et éviter tout risque d’anticonstitutionnallité ». D’ailleurs, il prévient déjà que cette méthode pourrait être rejetée par le Conseil Constitutionnel qui « censure les dispositions qui n’ont pas un rapport direct avec l’objet du projet de loi. »
Source : www.01net.com